En cette fin d’année 2025, le Médecin Lt-Col. AKATA Eyouvéi, Directeur Général de l’Hôpital de Référence Dogta Lafiè, s’est confié à nous dans une interview exclusive réalisée ce mardi 23 décembre. L’occasion de revenir sur une année exceptionnelle, jalonnée d’innovations majeures, de percées technologiques dans la lutte contre le cancer, de l’inauguration de l’annexe de Kara, des premières Journées Médicales et d’une présence remarquée sur la scène continentale. Sans éluder les critiques ni les défis, il dévoile également les perspectives ambitieuses qui attendent l’hôpital en 2026. Bonne lecture
Bonjour Mr le Directeur Général, une année riche qui touche à sa fin et qui a été marquée par une diversité de riches événements à l’Hôpital de Référence Dogta-Lafiè. Parmi ces faits, nous avons pour commencer, l’inauguration d’une annexe à Kara en début d’année. Dites-nous ce qui a motivé cette décision ?
Médecin Lt-Col. AKATA : je tiens d’abord à vous remercier pour cette initiative qui nous permet de faire le bilan de nos activités en cette fin d’année. L’objectif des autorités compétentes et des promoteurs, en décidant de l’ouverture d’une annexe à Kara, le 24 janvier 2025 était d’offrir à la population du septentrion, en particulier celle de la région de la Kara, un accès à des soins de qualité équivalents à ceux disponibles à Lomé. Pour cela, il fallait créer une structure médicale complète, une sorte de version compacte mais pleinement fonctionnelle du centre hospitalier de référence.
C’est ainsi qu’à Kara, nous avons décidé de renforcer l’ensemble des services : un laboratoire performant, un service d’imagerie moderne, afin de permettre aux médecins de poser des diagnostics fiables et précis. Un bon diagnostic facilite toujours la prise en charge thérapeutique. Cette vision a également conduit à la création d’un service de dialyse. En effet, en dehors de Lomé, il n’existait aucune possibilité de réalisation d’actes de dialyse, obligeant ainsi les patients du Nord à de longs déplacements. Nous avons donc voulu répondre à ce besoin essentiel, notamment pour les personnes souffrant d’insuffisance rénale chronique.
À cela s’est ajouté un service d’ophtalmologie. Vous savez que cette spécialité nécessite des équipements modernes, souvent très sophistiqués. Nous avons estimé qu’il était indispensable d’offrir à Kara un plateau technique complet, comparable à celui de Lomé, afin d’assurer une prise en charge oculaire de haut niveau. Voilà ce qui a motivé l’ensemble de ces initiatives et structuré notre vision depuis l’ouverture. Nous avons également mis en place un service de stomatologie, afin de prendre en charge les patients souffrant de problèmes dentaires ou bucco dentaires. Et pour compléter notre offre, nous finalisons actuellement l’ouverture d’un nouveau service spécialisé, qui sera opérationnel dans les semaines à venir. Cela permettra de renforcer encore davantage notre plateau technique. Voilà, en résumé, ce qui a motivé l’ouverture de l’annexe de Kara.
Dogta-Lafiè a été au cœur de plusieurs révolutions sanitaires cette année dont la plus saluée est la lutte contre le cancer de la prostate, avec l’introduction du Focal One. Quel a été le réel impact de cette avancée pour le Togo ?
Médecin Lt-Col. AKATA : il est important de saluer ici la vision des premiers responsables, notamment le Conseil d’administration de l’hôpital, et en particulier le Président du Conseil, qui a porté cette idée ambitieuse de construire cet établissement. Grâce à l’engagement constant de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale, aucun effort n’a été ménagé pour doter l’hôpital d’infrastructures répondant aux normes et standards internationaux. L’hôpital Dogta Lafiè a fait de la lutte contre le cancer l’une de ses priorités majeures, un véritable défi stratégique. C’est pourquoi nous ne manquons jamais les campagnes d’Octobre Rose et de Novembre Bleu. À travers ces initiatives, nous aidons la population — femmes comme hommes — à accéder à la prévention, au dépistage précoce et à l’information sur les cancers du sein, du col de l’utérus et de la prostate.
Mais nous avons estimé qu’il fallait aller encore plus loin. Lors d’un salon médical en France, l’un de nos promoteurs a découvert un équipement innovant, un dispositif français encore peu répandu. Après avoir pris contact avec les fabricants, nous avons pu évaluer la technologie et constater son immense potentiel. Cet appareil, le Focal One, nous permet non seulement de renforcer la prévention, mais aussi d’améliorer considérablement le diagnostic précoce. Il s’agit d’un oncographe de haute précision, capable de détecter très tôt des lésions suspectes. Cela permet aux chirurgiens d’intervenir rapidement, de confirmer le diagnostic et d’identifier, dès les premiers stades, un éventuel cancer localisé. Et lorsqu’un cancer est détecté précocement et bien localisé, un autre équipement complémentaire — l’Exavue — permet d’assurer un traitement radical, complet et efficace.
Ces deux technologies se renforcent mutuellement. Nous avons donc décidé d’introduire cette innovation au Togo, afin d’offrir à la population togolaise un accès à des outils de pointe. Nous sommes d’ailleurs fiers d’être les premiers dans la sous région à disposer de cet équipement, ce qui représente une avancée majeure pour notre système de santé.
Des journées médicales, une autre innovation, …, objectifs, attentes, résultats,…, on en parle un peu ?
Médecin Lt-Col. AKATA : pour revenir aux Journées Médicales d’octobre 2025, il est important de rappeler les motivations qui ont guidé leur organisation. Après deux années d’exercice, nous avons estimé qu’il était nécessaire de rassembler les acteurs de la santé afin d’échanger sur des sujets médicaux d’actualité et, surtout, de présenter les capacités réelles de notre plateau technique.
Car si vous ne montrez pas aux gens ce que vous êtes capables de faire, ils ne peuvent pas le deviner. Ces premières Journées Médicales avaient donc trois objectifs principaux : créer un réseau solide entre praticiens hospitaliers nationaux et internationaux. Nous avons invité des médecins de tout le Togo et de l’étranger, et ils ont répondu présents ; valoriser la recherche médicale locale, en mettant en avant les travaux et innovations réalisés ici, et renforcer la sensibilisation des populations, notamment sur la prévention. Durant ces journées, nous avons beaucoup travaillé sur la prévention, abordé de nombreux thèmes et mené plusieurs actions de dépistage et d’éducation sanitaire. Les résultats ont été à la hauteur de nos attentes. Les objectifs fixés ont été pleinement atteints.
Votre Hôpital a également été l’attraction majeure au 2ème Congrès Africain de la Santé. Quelle a été l’implication de l’HDL à ce grand rendez-vous continental et quelles en seront les incidences majeures ?
Médecin Lt-Col. AKATA : comme je le dis souvent, si vous ne montrez pas vos compétences, personne ne peut savoir ce dont vous êtes capable. Nous disposons d’outils modernes et d’un véritable savoir faire. Il était donc essentiel de communiquer, y compris à l’international, notamment dans des pays où le tourisme médical est très développé. L’objectif était de faire réaliser aux populations africaines qu’elles n’ont plus besoin d’aller hors du continent, car leur pays voisin dispose désormais de structures capables d’offrir des soins de haut niveau. C’est ce qui nous a conduits à participer au congrès de N’Djamena, où nous avons présenté l’hôpital et nos expertises. L’accueil a été très positif ; les participants ont découvert ce que Dogta Lafiè est capable de faire. Ce n’était d’ailleurs pas notre première initiative. En début d’année, nous étions également à Abidjan pour un congrès médical, où nous avons présenté nos compétences. Ces participations nous ont permis de constater que nous nous positionnons désormais à un niveau élevé, ce qui est très encourageant.
Dogta-Lafiè, malgré toutes ces victoires qualitatives fait face à des stéréotypes de certains acteurs, en rapport avec de prétendus coûts des offres de soins exorbitants, de même que d’autres potentiels défis. Quels sont les différentes pesanteurs auxquelles l’Hôpital fait face de manière récurrente et quelles approches de solution avez-vous défini ?
Médecin Lt-Col. AKATA : il est vrai que certains coûts peuvent paraître élevés aujourd’hui. Toutefois, nous travaillons à revoir notre grille tarifaire afin de rendre nos services plus accessibles à l’ensemble des citoyens togolais. C’est un point important pour nous. Concernant les critiques formulées à notre encontre, il faut préciser qu’il y a plusieurs éléments que les populations ne maîtrisent pas entièrement. Cet hôpital est un projet porté par la Caisse Nationale de Sécurité Sociale. Il s’agit d’un investissement majeur, auquel se sont ajoutés des partenaires privés. De ce fait, l’hôpital n’est plus un établissement public : c’est désormais un hôpital privé. Et qui dit hôpital privé dit absence de subventions. Nous devons donc fonctionner uniquement grâce à nos recettes. Cela implique de couvrir les salaires du personnel, l’entretien des équipements, la maintenance des appareils, la propreté des locaux… Tout cela représente un coût important.
Il est donc impossible d’appliquer les mêmes tarifs que ceux pratiqués dans le public. Sinon, comment payer les salaires ? Comment entretenir les machines ? Comment maintenir un environnement propre et sécurisé ? Les gens disent souvent que l’hôpital est très propre — et c’est vrai — mais cela nécessite une équipe spécialisée. Nous travaillons d’ailleurs avec une société experte en nettoyage médical, et ce service a un coût. C’est pourquoi nos tarifs ne peuvent pas être alignés sur ceux du secteur public. Sans cela, l’hôpital ne pourrait tout simplement pas survivre. Et lorsqu’on nous dit que nous sommes chers, il faut comparer ce qui est comparable. Par rapport aux autres établissements privés du pays, nous sommes compétitifs. Je demande donc aux citoyens de ne pas nous comparer au public, mais aux autres structures privées, puisque nous fonctionnons selon les mêmes règles. Même si la CNSS reste l’actionnaire majoritaire, nous demeurons un établissement privé, avec les contraintes financières que cela implique. Quant aux autres critiques, notamment celles affirmant que « dans cet hôpital, on meurt », il faut être sérieux. Il n’existe aucun hôpital au monde où l’on ne meurt pas. La question n’est pas de savoir si des décès surviennent, mais dans quelles conditions les patients arrivent et quelle est la gravité de leur état.
Nous ne pouvons pas répondre publiquement à chaque rumeur ou à chaque cas particulier. Nous avançons avec professionnalisme et sérénité. Ce qu’il faut retenir, c’est que notre taux de mortalité tourne autour de 2 %. C’est l’un des meilleurs taux au Togo, dans la sous région, et même au delà. Cela signifie que nous avons un taux de guérison proche de 95 %. Que peut on dire de plus ? Comme le rappelait Hippocrate, le père de la médecine : « Guérir parfois, soulager souvent, consoler toujours. » C’est exactement notre mission. En tant que soignants, notre rôle est d’apporter du confort, de fournir des soins de qualité et d’accompagner chaque patient avec dignité. Les défis existent, mais ils ne remettent pas en cause notre engagement ni la qualité de nos prestations. Les questions financières, comme dans toute entreprise privée, exigent rigueur et adaptation, mais elles n’ont pas d’impact sur la qualité des soins ni sur notre fonctionnement.
Quelles sont vos perspectives pour la nouvelle année ?
Médecin Lt-Col. AKATA : l’hôpital poursuit sa modernisation et son expansion. Pour 2026, trois grands projets sont programmés : d’abord, nous prévoyons l’ouverture du pavillon de cancérologie. Ce service prendra en charge les patients atteints de cancer, avec une offre complète de traitements curatifs, de traitements préventifs et des soins palliatifs pour accompagner dignement les patients en fin de vie. Nous disposerons de quatre types de traitements notamment, la chimiothérapie, la radiothérapie, l’immunothérapie et la médecine nucléaire. Ce service sera animé par des spécialistes ayant plus de 15 ans d’expérience, incluant des experts locaux formés et des praticiens internationaux qui ont choisi de nous rejoindre. Nous prévoyons également l’ouverture de l’annexe de Blitta dont les travaux sont en phase de finition. L’inauguration est prévue d’ici la fin du premier semestre 2026. Enfin, nous allons procéder à l’entame chantier de Dapaong, un projet qui vise à offrir aux populations de l’extrême Nord un accès à des soins de qualité équivalents à ceux de Lomé, Blitta et Kara.
L’annexe de Dapaong permettra d’assurer à la fois des activités de prévention et des soins curatifs.
Nous sommes arrivés au terme de cet entretien Directeur, avez-vous un message particulier à la population togolaise en cette période de fin d’année ?
Médecin Lt-Col. AKATA : Dogta Lafiè n’est pas seulement un hôpital. C’est un véritable projet de société, qui place la santé au cœur du développement national. En cette fin d’année 2025, je souhaite à nos patients, partenaires et collaborateurs une année 2026 placée sous le signe de la santé, de l’innovation et de la solidarité. Que chacun trouve, au sein de nos services, non seulement des soins de qualité, mais aussi la confiance en un avenir meilleur. Merci
Fin
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